dimanche 18 janvier 2009

Dimanche aux Buttes-Chaumont

"Tout est gratuit, ce jardin, cette ville et moi-même. Quand il arrive qu'on s'en rende compte ça vous tourne le coeur et tout se met à flotter, comme l'autre soir, au Rendez-vous des Cheminots : voilà la Nausée; voilà ce que les Salauds essaient de se cacher avec leur idée de droit. Mais quel pauvre mensonge : personne n'a de droit; ils sont entièrement gratuits, comme les autres hommes, ils n'arrivent pas à se sentir de trop. Et eux-mêmes, secrètement , ils sont trop, c'est-à-dire amorphes et vagues, tristes."
La Nausée - Jean-Paul Sartre























Cécilia semblait plutôt réticente, elle n'aime pas les parcs en hiver alors qu'ils me sont intolérables en été, me donnent envie de m'évanouir, parce que c'est trop de choses en même temps. Marie voulait aller au Dôme, je lui ai répondu "ça saoule le Dôme, moi aujourd'hui je vais aux Buttes-Chaumont", elle était d'accord, Cécilia aussi. J'ai testé pour la première fois la ligne 5, dans ma rame ça sentait tellement mauvais que je suis descendue et que j'ai pris le suivant. Je les ai retrouvées, Marie a senti l'odeur d'une boulangerie (on la sent toujours bien après la boulangerie), l'odeur de pain au lait qui reste comme la meilleure pub qu'une boulangerie peut avoir. Le truc c'est qu'on sent cette odeur mais qu'on achète tout autre chose, en l'occurence ici Marie a acheté une demi-baguette qui était bien chaude et très salée selon les dires de Cécilia.
Nous nous sommes promenées, c'était mieux que de flâner dans les rues, mieux que de faire naître mille désirs devant mille vitrines, ici tout était gratuit, il n'y avait rien a touché, seulement s'émerveiller très bêtement devant un vieil arbre, devant une famille qui semblait y avoir ses habitudes, le lac gelé qu'on aurait voulu percé avec des cailloux comme on perce de sa cuillère le dessus d'un dessert. Marie voulait monter partout, elle aime la hauteur comme les enfants peuvent l'aimer, Cécilia se plaignait de l'odeur de terre humide et restait assise sur un banc à lire son Goethe pendant qu'on prenait des photos, moi j'adorais ça la terre humide, je préfèrais ça à l'odeur de sueur végétale qu'on sent en été, j'aurai voulu m'enfoncer les mains dedans et m'en faire un masque. Nous sommes sorties, Marie avait faim alors on a fait un détour au Mcdo de Saint-Michel pour lui payer une connerie. Le caissier était très très beau et on gloussait dans sa queue comme des pétasses. J'ai dit à Marie "demande lui son numéro et après tu me le passes...peut-être qu'il te le glissera dans le sandwich". Je me suis détournée de la caisse en attendant qu'elle commande, c'est ensuite que Cécilia m'a raconté que Marie avait osé lui demander "vous avez mis votre numéro à l'intérieur ?", il avait répondu "non" en souriant poliment. Aïe.Quant au week-end prochain, elles étaient prévenues : "Dimanche prochain, Montsouris".

10 commentaires:

Michael Flame a dit…

Bonsoir Murielle,

Très jolies Buttes!

Admirativement,

MF

Anonyme a dit…

Juste à coté du parc de Montsouris, au nord-ouest, y a les réservoirs de Montsouris, j'avais trouvé ça très curieux et très beau. Jette y un oeil.

Anonyme a dit…

"on gloussait dans sa queue"...?

Murielle Joudet a dit…

queue : File de personnes qui attendent leur tour.

glousser : émettre des gloussements

Anonyme a dit…

Plus de Monsieur Delmas, tes postes sont beaucoup plus interessant à présent. Tu as enfin fais une croix sur lui ?
Anonyme => j'avais aussi relevé le double sens, mais je me suis abstenu moi. Vous avez du cran pour lui demander son numero au caissier, bravo. Je trouve ça vraiment bien que les femmes fassent le premier pas.

Anonyme a dit…

triomphe de l'image, texte au milieu, "sa sentait": vernis?

Murielle Joudet a dit…

non je n'ai pas fait une croix sur lui, j'ai juste le privilège de choisir ce que j'ai envie de raconter.

Même si cette expression me semble joliment désuette, oui, c'est "vraiment bien" que les femmes fassent le premier pas. Pour le coup c'était plus un "cap ou pas cap" qu'autre chose. Marie a senti qu'elle n'avait rien à perdre et surtout rien à gagner, à partir de là tout était permis.

ashorlivs a dit…

Salut,
tu n'avais réellement *jamais* pris la 5 auparavant ?

Murielle Joudet a dit…

Franchement je pense pas, la pastille orange qui caractérise la ligne 5 m'a donné le goût de quelque chose de tout à fait neuf.

ashorlivs a dit…

Alors là tu m'épates !

Cependant c'est une bonne occasion de constater qu'on peut faire du tout à fait neuf avec du tout à fait vieux...