dimanche 19 avril 2009

Cécilia qui me dit que j'ai fait deux fautes d'inattention sur mon blog et qu'elle voulait me le dire. Cette scène comme la somme des 2 ans et demi d'une amitié acquise progressivement.

Julie qui m'envoie un mail plutôt long, c'est la première fois qu'elle m'écrit autant et je perçois dans cette première missive comme le début de quelque chose de plus sérieux entre nous, basé sur un double langage, ou deux relations parallèles. La réelle, celle qu'on peut avoir au lycée, une relation très légère et où l'on rit beaucoup, où les sentiments et impressions de l'une sur l'autre se taisent sans forcément qu'on ressente des non-dits entre nous. Puis ce qu'elle vient d'inaugurer avec ce mail, c'est à dire l'expression de ce qui peut entraver le bon déroulement de notre amitié, un monde de langage où l'on s'explique.

Au cinéma, lors de la projection de Reinette et Mirabelle, quelques secondes où la pellicule déconne. Frayeur dans la salle à l'idée de rater quelques secondes du film, à l'idée que l'histoire s'arrête, comme les restes d'un réflexe enfantin.

Nous mangeons dans un snack libanais très propre, le menu est si exotique pour le novice que sa dernière page est consacré à un "dictionnaire des saveurs". Cécilia qui prononce sans comprendre le nom des plats, "hommos...vous mangez des hommes ??"
En musique de fond les grandes chanteuses libanaises actuelles, et la serveuse qui sert comme une mère libanaise et dont je repère l'accent si particulier : la façon qu'ont les libanais de mieux parler français que nous, sans procéder à des raccourcis, des apostrophes partout.

Nous mangeons le même sandwich entourées de libanais dont certains me rappelent mes oncles venant manger seul chez ma grand-mère avec tout les plats déployés devant eux, comme des enfants gâtés, les épaules voûtées sur leur assiette. Physiquement il y a plusieurs façons d'être libanais et dans la salle elles y sont toutes.

Cécilia qui me dit "tu dis toujours ça, tu dis toujours "je suis pas compliquée"" sur le ton véhément de la révélation. Elle a raison et je suis contente qu'elle ait mis le doigt sur un de mes tics de langage, un de mes tics de pensée. C'est vrai qu'au fond je trouve que je ne suis pas compliquée, pas difficile, que je ne fais pas d'histoire d'exigences. Mais je crois aussi que c'est en partie très faux.

Connection tardive à internet, j'avais une première fois dans l'après-midi répondu à mes mails et ce soir là je reçois toutes les réponses: 8 mails dans ma boîte. Je ne pense pas en avoir déjà eu autant et c'est un véritable plaisir que de les ouvrir un à un comme des cadeaux, et même avec une excitation largement plus grande puisqu'il s'agit de la surprise non du choix de l'objet offert, mais la surprise des mots et du propos, je ne me lasse pas de relire ces phrases et de finir par en comprendre le sens profond, l'intention. Le langage est finalement source d'un plaisir inépuisable.

Mail de A. qui confirme pour mardi. Je me connais, j'aurai des envies de le relire dans la soirée alors je le copie/colle dans Word.

Nous finissons par prendre un dessert à la pâtisserie tunisienne. J'hésite entre plusieurs formes de biscuits dégoulinant de miel et je prends la pâtisserie ressemblant le plus à celles qu'on trouve devant les églises libanaises les jours de fête chrétienne, un beignet au miel. Le vendeur est gentil et il nous donne les plus grandes parts de ce qu'on demande, il nous demande si on veut des serviettes "vous êtes des filles, vous êtes pas comme nous les garçons, vous restez pas comme ça" mimant l'essuyage d'une bouche avec une serviette.
Dès la première bouchée je me sens déjà gavée, Cécilia dit "mon taux de cholesterol vient de monter", je fais mine d'avoir des difficultés à marcher, sur le trajet du métro on se plait à ce jeu-là.

Discussion mère/fille dans l'intimité de la salle de bains, chacune de nous deux est en train de se faire les cheveux. Je lui parle de cette chemise que j'ai en double mais dans deux couleurs différentes et dont le modèle bordeau présente un défaut au niveau du bouton se fermant sur la poitrine, les deux pans s'écartent, laissant voir ce que j'ai en dessous, comme si j'avais grossi, mais la bleue elle par contre reste en place. Elle me dit que parfois, un centimètre change tout, que c'est simplement un défaut de fabrication. Je lui dis qu'avant ce n'était pas comme ça, puis je réessaie la chemise et alors tout va bien, aussi, entretemps j'ai maigri un peu. Je suis soulagée parce que j'adore cette chemise.
Ensuite je lui dis que j'allais laisser pousser mes cheveux, comme du temps de la 4ème où ils m'arrivaient aux épaules et où je ressemblais à une princesse aux yeux cernés. Je lui dis que ça me va mieux, elle me dit "oui oui, mais je te l'avais dit, toi tu voulais un carré court",
oui mais le carré court je trouve ça beau aussi, tout me va.
oui laisse les pousser parce qu'après tu pourras plus
oui après ça fera négligé.
Je suis un peu triste à l'idée que même les cheveux aient leur jeunesse.
Je reste tout de même excité à l'idée que je vais avoir de longs cheveux qui déborderont de mon écharpe comme d'un vase.

Cela fait quelques temps que je n'ai pas mangé la cuisine de ma mère. A cause de mon régime mais aussi de ces déjeuners et dîners au restaurant et des soirées où je ne mange qu'un potage industriel ou une boîte de conserve et que j'avale dans l'unique but de remédier à ma faim comme s'il s'agissait d'un problème.

Au Mcdo, je paye mon petit coca light, la fille "oh elle est belle cette pièce"

Au Jardin des Tuileries, une nana qui je crois en me voyant, s'exclame "toutes les filles les ont", je pense qu'elle parlait de mes Wayfarer, parce que je dis exactement la même chose quand je croise une fille avec. Je suis un peu vexée qu'elle me réduise à ça, avec ou sans je reste un être humain.

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