samedi 5 juillet 2008

quand A. m'a écrit un message privé pour m'inviter à sa soirée "ultra private" ça m'a fait un coup au coeur, c'était magnifique à relire, magnifique à s'imaginer, j'aurai pu en pleurer, c'était taillé trop grand pour mon coeur, j'avais envie de continuer à vivre au moins jusqu'à lundi, le jour de la soirée.
il m'a dit que X serait sûrement là, la dernière fois que nous nous sommes vus X et moi il faisait encore froid à Opéra et il avait commandé des tartines pendant que moi je sirotais par tout les temps ce Coca Light qui est partout le même. je m'en souviens très bien, c'était pendant des vacances, je lui disais que je m'ennuyais, il m'avait donné rendez-vous quelques heures après. je n'en avais pas eu tellement envie, il commençait à me faire un peu peur, lui et son désir, surtout qu'il n'aimait que ça, la meuf de 16 ans, et moi je l'admirais sans l'aimer. Son travail et sa culture, la façon dont il s'y plongeait, sans jamais s'arrêter et de manière extrêmement solitaire, parfois des oeuvres laborieuses que personne n'approchait, il ne s'en vantait jamais; je crois qu'à l'époque du rendez-vous il lisait "La vie de Jésus" d'Ernest Renan ou alors un fragment des mémoires de Saint-Simon, j'hésite un peu. J'ai découvert beaucoup de choses avec lui, parfois à son insu, juste en l'observant vivre et en tentant de l'imiter sur certains points.

Il était beau, exceptionnellement beau pour un homme rencontré sur internet, il ne portait que des chemises. La première rencontre pendant un concert de Paris, j'avais tellement hésité à venir et je lui avais dit de choisir pour moi, "viens" avait été son mot, et une fois là-bas nous nous sommes retrouvés portant à peu de choses près la même chemise, une connivence nous liait et faisait dire aux autres que nous étions frère et soeur. Nous étions partis ensemble, c'est là que le reste à commencer mais pas trop longtemps, quelques mois, quelques jours pendant quelques mois.
C'est un homme très sérieux et je sentais que d'une certaine façon il me méprisait, me négligeait, ou que disons il ne ressentait absolument rien de fort pour moi, que parfois il me trouvait bête, malgré sa gentillesse infinie, ces impressions étaient insupportables.
Mais cette dernière fois je me sentais lassée de lui, il était un peu moins beau, son visage n'était plus cette bonne surprise lumineuse vers laquelle le regard se tourne à la manière d'un tournesol, nous n'avions rien à nous dire en dehors d'un léger debriefing sur ma journée avec A. et puis je crois que c'est à ce rendez-vous là que je lui prêtais "Novovision" d'Yves Adrien qu'il ne m'a toujours pas rendu, non pas qu'il compte le garder mais comme je disais, depuis nous ne nous sommes plus revus et ce livre est entre nous comme une promesse de retrouvailles utilisable à tout moment.

Je l'ai toujours énormément admiré et il n'en a jamais rien su, je pense l'avoir compris beaucoup plus qu'il ne le pensait, sa robustesse au travail, son désintérêt total pour les mondanités, c'est surtout ça qui me fascinait. Il avait l'air de vivre tranquillement, il avait l'air heureux pour de bonnes raisons, il avait saisi les bonnes opportunités au bon moment, il devait être en paix avec lui-même et selon les points de vue j'apparaissais comme une parenthèse ou une tâche dans sa vie, une tâche dont personne n'en savait rien à part peut-être A.. Il me répétait souvent de ne rien dire à personne, plutôt sur un ton de "c'est évident que tu ne dois rien dire, tu le sais, tu es intelligente", je ne voulais en rien lui faire du mal ou des soucis et j'ai réussi à tout garder dans ma bouche, sauf avec mes copines même si j'y revenais sur le ton de la rigolade.
J'en garde de très bons souvenirs, nous étions deux personnes très fréquentables mais notre relation était malsaine, et à l'origine s'y trouvait un ennui à rectifier.

Si je devais lui reprocher un truc ce serait peut-être de s'être abaissé à...(le choix des mots est important) me convoiter, c'est ce qui fait la différence entre lui et A. qui semble totalement imperméable face à moi. Je ne voulais pas dire "me faire des avances" à la place de "convoiter" même si j'aurai pu mais ce serait exclure mon rôle de tout ce qui s'est passé. Il ne s'est d'ailleurs rien passé de grave même si ça aurait pu, surtout qu'il y avait des circonstances aggravantes mais dans son ensemble tout cela reste quand même assez anodin dans le sens où ça n'engage que deux toutes petites existences sur des milliards d'autres petites, ce n'est pas de la politique.
J'ai écrit des textes sur tout ça, des textes assez longs, très précis, que j'écrivais le soir-même après nos rendez-vous, mais il était le seul à les lire, il aimait bien ça.

Pour conclure (le spectre de mon oral de français me hante) disons que si je le revois lundi je serai curieuse de voir comment il compte m'aborder, me faire la bise, s'il y aura le pâle souvenir de notre relation dans son regard, quelques gestes qu'il s'accordera, des paroles équivoques ou si au contraire il compte bien se tenir, bavarder en toute amitié, plisser ses petits yeux brillants comme des olives pour ensuite s'effacer tout doucement. Les autres options ne sont jamais à négliger, ici il y en a deux
2) qu'il vienne accompagné et alors je ne pourrais tout simplement pas l'approcher, c'est pas que j'ai envie de le coller mais j'aimerais lui dire des choses, lui faire quelques compliments sur sa musique ou ses cheveux, lui dire où j'en suis, lui demander ses lectures du moment comme j'ai toujours fait
ou encore plus probable
3) qu'il ne vienne pas
ou pire encore, que cette soirée n'ait pas lieu pour des raisons qui m'échappent.

J'ai repensé à tout ça, à A. et à X dans ma vie, est-ce que j'avais aimé X, pourquoi j'aimais A. et pas X car pris comme ça, au premier abord X me correspond plus et est beaucoup plus beau et pourtant tout mes sentiments amoureux et mes obsessions se tournent vers A. seul.
Alors l'idée que je me retrouve dans son appartement, avec ses amis, ses incroyables grandes personnes sorties d'un monde fantastique, son lit -là où il dort-, sa cuisine -là où il se nourrit-, son ordinateur -de là où il me parle-, ses lectures -ce qu'il parcoure en silence, parfois même il s'arrête pour réfléchir à ce qu'il vient de lire ou à tout autre chose-, ses CD, son piano. Ce que j'éprouve en me figurant tout ça se rapproche d'un sentiment de terreur sacrée, pour tout vous dire, parfois je l'imagine en train de s'acheter des habits et ça me fait une sacrée boule de chewing-gum au bidon.

Brian Eno - St Elmo's Fire

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Ma curiosité me perdra un jour... mais tu passes un oral de français pendant les vacances, alors que tu es en seconde, non ? bonne chance en tout cas...

Murielle Joudet a dit…

ah non non, je suis en première littéraire.
et effectivement pour mon oral la chance a beaucoup compté, mais ceci sera une autre histoire...

Anonyme a dit…

mais il a quel age aurélien?